6e partie dans notre série sur la révision des Lois sur la radiodiffusion et des télécommunications
LE MONDE DES communications d’aujourd’hui est dominé par quelques grandes entreprises intégrées verticalement qui offrent de l’accès à l’Internet, de la radiodiffusion, des télécommunications et des services sans-fil. Ces firmes exercent un contrôle considérable sur qui a accès à leurs réseaux et quel contenu est disponible sur leurs réseaux respectifs.
Cela veut dire que les gouvernements et les régulateurs doivent s’assurer que les petits concurrents indépendants aient accès à ces réseaux et s’assurer que cet accès soit aussi neutre que possible. De plus, les grands propriétaires de ces réseaux ne devraient pas favoriser certains contenus plutôt que d’autres. Ceci, en résumé est la neutralité de l’Internet et, selon Konrad von Finckenstein, ex-président du CRTC et ex-commissaire de la concurrence,devrait être au cœur de toute nouvelle législation sur les communications.
«L’élément de base de toute nouvelle législation sur les communications, doit être l’Internet et la neutralité de l’Internet. Nous avons cette chose qui, pour la première fois dans l’histoire peut rejoindre tout le monde et tout le monde peut rejoindre tout le monde. Assurons-nous que ce soit déployé et utilisé pour le plus grand bénéfice de tous et non au bénéfice commercial de quelques-uns,» a-t-il dit.
Pour John Lawford, directeur exécutif du Centre pour la défense de l’intérêt public (CDIP), il est évident que la neutralité de l’Internet devra constituer une partie essentielle de toute future loi sur les communications, mais il rappelle qu’elle est déjà dans la Loi sur les télécommunications.
«La loi dit qu’il ne doit pas y avoir de discrimination et dans la partie 2, il est dit que toute entreprise propriétaire d’installations de télécommunications est une entreprise de télécommunications, au sens de la loi. On ne peut être plus clair. Je veux dire, on pourrait définir entreprise de télécommunications dans la section des définitions de la Partie 2 de la Loi, alors sinon cela prend le sens d’entreprise de télécommunications, un service public, tel que comprise en droit ce qui est assez solide,» a-t-il expliqué.
«La neutralité de l’Internet est un principe important pour nous, mais nous sommes confortables avec l’approche du CRTC» – Jay Thomson, CCSA
«Le seul avantage à définir dans un langage moderne est que plus de gens pourraient le lire et le comprendre, a-t-il ajouté»
Cal Millar, président de Channel Zero (propriétaire de CHCH, Rewind, Silver Screen Classics et autres canaux spécialisés), dit que c’est important de comprendre que la neutralité de l’Internet n’a rien à voir avec le blocage de sites web illégaux ou d’empêcher la distribution de matériel volé. Pensez à une automobile volée: c’est illégal d’en acheter ou d’en conduire une. La même chose vaut pour le contenu.
«La neutralité de l’Internet est incroyablement importante pour l’innovation, incroyablement importante pour l’accès. Si vous n’avez pas de neutralité de l’Internet, comment voudriez-vous que dans ce nouveau monde que des producteurs, des radiodiffuseurs, des agrégateurs et des autres joueurs indépendants ou, tout simplement, de nouveaux joueurs puissent avoir accès aux réseaux. Ce sera un système à deux vitesses ou à trois ou quatre vitesses où nous serons exclus répliquant les iniquités du présent système,»a-t-il dit.
C’est aussi important de comprendre que les grandes entreprises intégrées verticalement favoriseraient leur propre contenu au détriment de celui de leurs concurrents sans cette protection.
Clairement Rogers, Bell, Corus/Shaw et Videotron auraient certainement, dans un environnement libre et ouvert, absolument le droit de favoriser leurs services aux autres et de travailler ensemble. Ce n’est pas de la collusion, mais du mercantilisme pur – ne me faites pas mal, et ne vous ferai pas mal, mais c’est parce qu’ils contrôlent les moyens de distribution. Vous avez besoin de règles d’accès et la neutralité de l’Internet pour remplir ce rôle dans un monde moderne totalement opposé à la pensée de l’ancien temps,» dit-il.
Avoir des règles d’accès appropriées et des mesures pour s’assurer que tous les contenus reçoivent un traitement égal, est particulièrement important pour les petits joueurs dans le système canadien.
Jay Thomson, PDG de la Canadian Cable Systems Alliance (CCSA), a noté dans une entrevue avec Cartt.ca que même si certains petits FSI pouvaient vouloir plus de flexibilité dans leur traitement du contenu (ceci est arrivé aux États-Unis où la Federal Communications Commission a invalidé ses lois sur la neutralité de l’Internet), un tel geste au Canada serait déconcertant pour les petits FSIs indépendants.
«Étant donné que nous sommes des petits joueurs indépendants et que les gros FSI sont également propriétaires des émissions les plus populaires, nous serions préoccupés que sans règle de neutralité de l’Internet, les gros joueurs puissent utiliser leur nouvelle flexibilité pour favoriser leurs services de programmation pour leur propre bénéfice et à notre détriment,» a-t-il dit.
Jay Thomson a ajouté que la manière dont on traite la neutralité de l’Internet présentement lui convient. «La neutralité de l’Internet est un principe important pour nous, mais nous sommes confortables avec l’approche du CRTC.»
Note de l’éditeur: Nous aurions aimé inclure les commentaires d’autres grandes entreprises verticalement intégrées, mais elles ont décliné nos demandes d’entrevues.